Avec la réforme territoriale en cours, cri d’alarme pour notre cadre de vie et pour la démocratie

ericdubourgnoux5 questions à Eric Dubourgnoux, Maire de St-Gervais-sous-Meymont

1) Eric, tu es membre de la commission départementale de la coopération intercommunale (CDCI) ; que vont devenir nos communautés de communes sur l’arrondissement d’Ambert ?
Le préfet propose une grande communauté de communes qui regroupe les sept communautés actuelles (Olliergues, Cunlhat, Haut-Livradois, Ambert, Livradois-Porte d’Auvergne, Arlanc et Vallée de l’Ance). Dans un délai restreint, les communes et les communautés de communes devront donner un avis sur ce projet de fusion qui va créer un territoire très vaste et qui va incontestablement amplifier l’éloignement entre les élus et les habitants.

2) On sent une inquiétude chez toi. Quel est ton sentiment ?
La loi NOTRe (nouvelle organisation territoriale de la République) vient d’être votée au Parlement sans les voix des députés du Front de gauche. Elle impose un seuil minimum de 15 000 habitants pour les communautés de communes et nous n’avons malheureusement pas d’alternative crédible. Ceci étant, il faudra être attentif à la définition d’un vrai projet de territoire qui s’appuie sur la centralité de la ville d’Ambert et qui valorise nos atouts industriels, agricoles et touristiques… Il faudra également continuer à nous mobiliser pour que l’État ne profite pas de cette fusion pour accentuer la fermeture des services publics (écoles, collèges, hôpital, bureaux de poste, etc…). Enfin, je serai personnellement très attentif à la façon dont seront traités les agents titulaires et contractuels des communautés de communes actuelles.

3) N’y a-t-il pas un lien entre un tel regroupement et la fusion des régions ?
Bien sûr, toutes ces réformes ont une logique commune. D’une part, il s’agit de rentrer dans les critères d’austérité de l’Union européenne. Ainsi, les élus locaux sont confrontés à une baisse drastique des dotations de fonctionnement des communes et des communautés de communes. D’autre part, le gouvernement, qui impose ces politiques de restriction budgétaire, a fait le choix de structurer notre pays pour le rendre plus attractif pour les grands groupes, en concentrant les investissements sur les grands centres urbains comme cela risque d’être le cas sur la métropole de Lyon avec la fusion des régions Auvergne et Rhône-Alpes. C’est pourquoi, l’erreur majeure serait de faire une fixation sur le seul redécoupage des communautés de communes sans analyser les autres aspects des lois sur la réforme territoriale votées depuis 2 ans.

4) Avec ces réformes, quels sont donc les risques pour notre arrondissement ?
Le gouvernement veut structurer le territoire national autour de 2 institutions majeures : les grandes régions et les intercommunalités. C’est le sens des réformes qui ont été votées. Il a aussi introduit des modifications législatives qui auront de graves conséquences, notamment pour les territoires ruraux. Ainsi, la législation incitative pour la création des communes nouvelles : on veut que les petites communes se regroupent. De gré d’abord… de force ensuite ? On sait, pourtant, le rôle décisif que jouent quotidienne-ment les maires et les élus ruraux pour assurer la proximité et l’équilibre social avec leurs administrés. A qui fera-t-on croire que ce lien si précieux sera maintenu avec des grandes communautés locales et des grandes régions.
Il y a une autre menace, c’est l’avenir en pointillé pour les conseils départementaux qui, eux aussi, sont dans le collimateur. Certes, le gouvernement a reculé après l’annonce de leur suppression par Manuel Valls, mais le conseil départemental est sans doute le plus menacé quand on sait qu’il fait face à une forte baisse des dotations de l’État alors que ses compétences engendrent des coûts qui explosent année après année (politique sociale, personnes âgées et dépendantes…) et qu’il est le premier partenaire financier des communes (voirie, bâtiments communaux…).
Chacun le mesure bien, il y a ce qu’on nous dit et il y a ce qu’on nous cache et qui inquiète le monde rural. On crée les conditions d’une concurrence totalement déloyale entre le monde rural et le monde urbain.

5) Faut-il se résigner à cette situation ?
Il faut nous mobiliser et ne pas nous résigner à cette politique. La France est un pays riche dans lequel il devrait faire bon vivre si la richesse n’était pas accaparée par une minorité. Il est possible d’en finir avec les restrictions imposées aux collectivités et de répondre aux besoins de tous les territoires avec une réforme fiscale courageuse qui mette à contribution les revenus colossaux qui explosent parmi les dirigeants des grandes entreprises industrielles. Il est possible de réformer les politiques bancaires pour qu’elles permettent enfin aux collectivités de financer leurs investissements avec des crédits suffisants et à des taux d’intérêt modestes.

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